• 16..Alors on fuit, c'est ça ?

    J'étais avec lui, et j'étais sûre que plus rien ne pourrait m'arriver.

    Mais j'avais tort.

    Ça me manque, d'avoir raison...

     

    Il m'a entraîné sur la colline, on a couru, dans les bois, aussi longtemps qu'on a pu, aussi loin pour s'éclaircir l'esprit, pour se dire qu'on est à l'abri de ces trahisons, que ça y est c'est fini ; pour sentir l'air sur nos visages et pour sortir de leur périmètre de contrôle.

    On s'est assis dans les feuilles, et je me suis dit qu'en d'autres circonstances, ç'aurait pu être un jour heureux, je serais peut-être sortie prendre l'air avec William, il m'aurait fait rire, et j'aurais pensé à Julian, comme ça, de loin. 

    Comme à un souvenir qu'on aimerait bien ramener au présent, comme à un désir qui nous effraie, et je serais restée bien au chaud dans mes convictions, entourée des sourires de William que je pensais si simple.

    Que je pensais connaître.

    Y a des pensées qui sont comme des douches glacées, et je suis revenue à l'instant, au moment où Julian caressait tendrement mes doigts ; j'ai loupé un chapitre ?

    -Et si on s'en allait ?

    J'ai dégluti, et ma salive est tombée d'un coup, comme une enclume, qui s'est faite un plaisir de trouer mon estomac.

    -Attends, Julian, tu penses ce que t'as dit ?

    Son regard m'a suffi. 

    J'aurais p'têt pas dû, mais j'ai paniqué.

    -Mais Julian, on peut pas tout quitter partir comme ça sur un coup de tête c'est pas une bonne idée et puis tu te rends compte de ce que tu dis de ce que t'as construit ils ont besoin de nous enfin de toi y a ta vie qui t'attends là-bas 

    -Tu rigoles ? J'ai tout détruit. Avec l'aide de Willi, évidemment.

    Son ton m'a glacée, son attitude m'a raidie, ok c'était stupide ce que j'ai dit, mais je ne m'attendais pas à ça ; ni la douche de culpabilité...

    -Pardon..

    J'ai baissé la tête, parce qu'au fond, j'ai coopéré, parce qu'au fond, je l'aime fort Willi et j'arrive pas à réaliser qu'il aie décidé de faire ça, et puis même qu'il en aie eu l'idée, de lui fusiller sa vie. 

    Il a ricané :

    -C'est pas ta faute.

    -Un peu.

    -Si tu veux.

    -Alors on s'en va ?

    -Non.

    -Pourquoi ?

    J'ai pris mon courage à deux mains pour expulser cette anxiété.

    Mais j'ai pas réussi. Alors je lui ai dit.

    -J'ai peur.

    -Oui, mais on est deux, c'est plus pareil, t'as pas de raison d'avoir peur.

    -On est deux ? Mais il y a à peine une semaine ou deux, tu ne me voyais même pas.

    Et ce sont mes mots qui ont assombri son regard. 

    -On en parle plus tard, tu veux ?

    Et cette colère rentrée, ça veut dire quoi, hein ?

    -Qu'est-ce qui te retiens ?

    -Ils nous chercheront, Julian. Willi ne laisse rien au hasard, et te laisser te balader dans la forêt, c'est tout sauf quelque chose d'intelligent. Ensuite, cette fuite, ça veut dire qu'on est coupables. Et pour finir, je me suis promis d'arrêter d'être lâche.

    -Waouh, ça fait beaucoup, tout ça.

    Il a enchaîné :

    -T'as peut-être raison, mais rester, ça veut dire qu'on est piégé dans sa partie d'échec, et si j'ai bien compris, il joue bien mieux que nous et y a peu de chances qu'on s'en sorte indemnes. Ou qu'on s'en sorte tout court.

    Des bruits de feuilles qui se froissent sous les pieds.

    On s'est regardés, comme des lapins pris dans les filets des chasseurs.

     

    Maéli.

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