• 4..Colère

    -Julian, je te le répète : on ne peut pas faire ça !!
    -Et si je te dis que si ?
    Je les écoute les yeux clos, entre deux mondes, n’ayant pas la force de penser. Je frissonne. L’eau était froide et le vent souffle.
    La peur grignote doucement la paix qui s’était installée en moi.
    Julian marche à un rythme régulier pendant que Zia brasse de l’air en s’énervant. La chaleur de son torse ferme me réchauffe et je me laisse glisser.
    -Julian.
    Zia a semblé s’être arrêtée prononçant le prénom de mon sauveur.
    Sa voix bouillonne de colère mais elle tente de se contrôler.
    -Tu ne vas pas tout de même faire ça ?
    Le moins perturbée du monde par cette rage, Julian lâche :
    -Si.
    -On doit la ramener derrière le Mur.
    -Et pour quelle raison ?
    - Tu nous mets tous en danger en l’amenant au village.
    Zia en disant, a rattrapé Julian.
    -Et quand tu m’as ramené, peut-être que tu n’as pas mis la communauté en danger ?
    Zia s’est tue.
    Je n’entends plus que le bruit des branches qui craque, l’eau qui dévale une pente au loin, le souffle régulier de Julian, et le calme, le calme.
    Julian semble pensif.
    Dans ce silence, il a dit à Zia :
    -Tu l’aurais laissée mourir ?
    -Evidemment.
    J’ai failli ouvrir les paupières brusquement et me relever, comme sortie d’un rêve, mais je n’ai même pas frémi. Je me trouve dans un état trop comateux pour en avoir la possibilité.
    Ma vie ne tenait qu’à un fil et Zia l’aurait regardé se rompre sans sourciller.
    -Et pourquoi ?
    Dans sa voix, je sens se volcan prêt à exploser et aussi comme de la mélancolie.
    -C’est devenu trop dangereux, Julian. Les Patrouilleurs s’enfoncent de plus en plus dans la forêt et nous sommes désarmés.
    -Je ne te reconnais plus Zia.
    Peut-être lui a-t-il lancé un regard plein de tristesse.
    -Où sont passés nos rêves de l’extérieur, de renverser la société, de fonder un nouveau monde et avant tout de donner une chance aux bannis de se reconstruire ??
    Sa voix s’est brisée sur le dernier mot.
    Parfois on se demande comment les liens peuvent se briser aussi vite ou les sentiments disparaître à tel point que l’on se demande s’ils ont réellement existé.
    -Il se passe que j’ai grandi, que mes utopies sont loin derrière moi et que tu prends trop de risque, Julian. La communauté passe avant tout. Et cette fille la met en danger. Il n’y a pas qu’elle qui est en danger, mais une seconde innocente qu’elle condamne.
    Les propos de Zia, puissants et sensés, résonnent dans mon cœur mille fois plus fort.
    -Donne-lui sa chance, Zia.
    -Sa chance, elle l’a : elle vit. Maintenant ramène-là derrière le Mur et elle ne se souviendra peut-être pas de nos paroles. C’est la meilleure solution.
    -Une vie reste une vie, Zia et la condamner à retourner derrière le Mur, c’est la condamner à la folie et au bûcher ; tu crois que c’est mieux ?
    Il a enchaîné sans laisser le temps à Zia de le couper.
    -Il y a autre chose, Zia, dis-le moi.
    -Rien de plus que le bien de la communauté et son bien à elle.
    -Laisse-moi l’emmener au village.
    -Je ne peux pas t’en empêcher.
    -Non, mais tu fais partie du Conseil et tu peux décider de la faire renvoyer derrière le Mur.
    -Tu n’as pas le droit de me demander ça.
    Les pas de Zia se sont accélérés et Julian l’a saisie par le poignet.
    -Au nom de tout ce qu’on a vécu, fais-le. Je t’en prie.
    Je sens Julian qui se penche vers Zia, comme s’il allait l’embrassait et Zia, qui d’une main sur son torse, le repousse.
    -Pourquoi parles-tu du nous qui a existé ? Alors oui, j’accepte au nom de notre amour. Mais elle n’est pas la bienvenue.
    Un ange est passé.
    -Pourquoi qui a existé, Zia ?

    Maéli.

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