• 2. Hantée

     

    Les rayons du soleil caressent ma peau et me réveillent.

    Je m’étire, mes pieds s’enfoncent dans la boue, je souris.

    Il fait bon, les oiseaux pépient. Jamais je n’ai eu de réveil aussi paisible.

    J’entends mon cœur battre, et je fais le vide en moi.

    Ma gorge sèche me force à me lever.

    Je trouve une flaque d’eau et je me penche, les yeux fermés pour boire. Je plonge ma tête en entier.

    Et, brusquement, j’ouvre les paupières.

    Je fais un pas en arrière et je tombe.

    Mon cœur bat à toute vitesse, ma respiration est rapide et heurtée ; je me sens mourir, un trou se creuse dans ma poitrine, noir et attirant, je voudrai n’avoir jamais ouvert les yeux.

    Je ne sais plus où je suis, je ne sais plus ce que je fais ; mais qui suis-je ?

    J’ai peur, oh mon Dieu, si peur.

    C’était réel.

    Les sanglots montent, m’étouffent, mettent mes armes au sol, et je m’effondre. Ils coulent sur mes joues et je pleure, pleure à en oublier le monde qui m’entoure.

    Je lâche tout et ma tête heurte une pierre en tombant sur le sol.

    J’ai si mal, oh oui si mal…

    Et je perds du sang.

    Mes mains agrippent la terre par poignée, la douleur me déchire les entrailles et rend la vie, vaine si vaine ; si la Terre pouvait s’ouvrir, pour m’emporter, pour me soulager…

    Mon dos se cambre sous la douleur. Physique et psychologique.

    « Tout est dans la tête » disait mon père.

    Mais si je n’existe plus ?

    Je suis l’air qui boit l’eau, le pied qui laisse une trace dans l’herbe, le sang qui coule, mais d’où ?

    Car oui si je me perds, si la folie m’emporte, si je perds mon existence, mon sens ; si je perds la tête, je viendrai à disparaître à mes propres yeux.

    Ainsi ma condamnation au bûcher sera prononcée.

    Peut-être que ça a déjà commencé.

    Si je suis condamnée avant la fin de l’automne, j’entraîne dans ma chute une deuxième fille. Lors de la prochaine moisson, deux seront maudites ; en sacrifice.

    J’étais belle, j’étais jeune, j’avais deux prétendants à l’accouplement ; tout est parti en miettes.

    Je perds du sang, je perds la raison et avec mes larmes, c’est la douleur qui trace son sillon sur ma peau.

    Quand mon esprit commence un peu à s’apaiser, que je me sens plus lucide, une pensée s’impose à moi, elle me percute, comme le ferait un boulet de canon sur un mur, elle explose en un millier d’étincelles, un millier de bout de verre qui s’incrustent dans ma peau, la traverse et me brise en mille morceaux.

    Une peur qui s’insinue dans chaque vaisseau sanguin qui me parcoure, qui accélère le rythme de mon cœur, qui me pousse à mettre mon chagrin de côté.

    Les Patrouilleurs.

    Je tente de me relever. Une, deux, trois fois. Je me sens faible, je tiens à peine sur mes pieds, je tremble encore un peu.

    J’ai le dos courbé, comme écrasée par le poids de cette malédiction. Je marche par petits pas, sans but ; j’erre jusqu’à ce que je m’arrête dans une petite clairière.

    J’ai faim.

    La faim me tiraille l’estomac, m’affaiblit, me force à fermer les yeux. Deux jours que je n’ai pas mangé.

    Il m’était impossible d’avaler quoi que ce soit avant la cérémonie ; si j’avais su…

    Je vais devoir trouver de la nourriture.

    Rentrer à la maison, me paraît juste impossible, au-dessus de mes forces ; et les maudites ont une semaine avant d’être obligé de répondre présent à l’appel quotidien.

    Je vais devoir chasser.

    Non non non non.

    J’aperçu une fleur de muguet et me mis à rire d’une manière hystérique.

    La vie est ironique à en faire mal…

    Je ne pouvais plus m’arrêter.

    Ce n’était pas la saison pour une telle fleur, mais je ne m’étonnai pas. Ce qui me brisai le cœur c’était les souvenirs accrochés aux petites clochettes de cette fleur ; ma mère m’avait dit un jour qu’elle portait bonheur et j’avais passé mon enfance à tenter d’en dénicher le plus possible, je portais une fleur de muguet sur ma robe, le jour de la cérémonie , et c’était celle qu’on avait déposée sur le cercueil de mon père…

    Mon rire finit par se taire et me laissa face aux souvenirs et à cette idée : j’allai devoir chasser.

    Maéli.

    « Parlons actu du blog, chers lecteursParler »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :